• Bob Dylan : Forever Young

    Bob Dylan, 80 ans (l’enregistrement date de 2021), performe Forever Young, chanson écrite en 1973.

    Version extraite de Shadow Kingdom, film concert et album.

    May God bless and keep you always
    May your wishes all come true
    May you always do for others
    And let others do for you
    May you build a ladder to the stars
    And climb on every rung
    And may you stay forever young

    May you grow up to be righteous
    May you grow up to be true
    May you always know the truth
    And see the light surrounding you
    May you always be courageous
    Stand upright and be strong
    And may you stay forever young

    May your hands always be busy
    May your feet always be swift
    May you have a strong foundation
    When the winds of changes shift
    May your heart always be joyful
    May your song always be sung
    And may you stay forever young

    . . .

  • Chroniques de Mars (2020 – 2022)

    17 Mars 2022, deux ans jour pour jour après l’entrée en vigueur du premier confinement en Macronie. Souvenez-vous, on nous avait demandé d’être patients – et obéissants – pendant deux semaines. Deux ans plus tard, les dernières mesures restrictives liées à l’épidémie tombent enfin, et encore, on ne sait pas pour combien de temps…

    À ressortir boire une bière ou un café dans un bistrot, à rediscuter avec des gens dotés d’une bouche et d’un nez, j’ai l’impression – et ce n’est pas qu’une impression – de sortir d’une période d’asociabilité de deux ans.

    Nous tombons le masque au moment même où éclate une nouvelle guerre. Cent un ans après avoir terrassé la Makhnovtchina, l’Armée rouge repart à l’attaque de l’Ukraine. Les immeubles s’écroulent, les civils meurent par centaines et les médias français, en transe (une pandémie puis une guerre, quelle chance inouïe), déclarent tous qu’il s’agit de la première guerre en Europe depuis la World War II, reléguant aux oubliettes le conflit yougoslave, ses camps de concentration, son siège de Sarajevo et ses négligeables 140 000 morts, alors même que Marioupol est en train de devenir une nouvelle Vukovar. Nous vivons vraiment une drôle d’époque…

    C’est dans ce climat étrange que j’ai décidé de faire une sorte de bilan musical de mes deux ans de vie sous pandémie. La musique ayant toujours occupé une place centrale chez moi – en écouter est une de mes activités principales – ces deux dernières années ont été forcément, disons, significatives à ce niveau-là.

    Chaque époque de ma vie a sa bande-son, voici celle qui va de Mars 2020 à Mars 2022, en sachant que je me suis quand même soumis à une contrainte bien nécessaire : étant donné que j’écoute énormément certains artistes, je me suis limité à un titre par musicien/groupe, sans quoi trois ou quatre d’entre eux auraient pris toute la place… La seule petite entrave à cette règle venant d’un Bob Dylan qui figure à la fois comme interprète de Key West (Philosopher Pirate) et comme auteur du My Back Pages interprété par les Magokoro Brothers. Pour le reste, je crois qu’il s’agit d’une compile assez variée même si quelques tendances se dessinent, et notamment une tendance croate, conséquence de ma virée en Croatie l’été dernier !

    Pour écouter les morceaux, cliquez sur Play et laissez dérouler la bande-son, vous pouvez aussi passer quand ça vous saoule, il y a vingt titres et ça part vraiment dans tous les sens ! Un peu plus bas, le tracklisting de la compilation avec, à chaque fois, le nom de l’artiste, le titre du morceau, l’album dont il est issu, l’année de sa sortie et la nationalité du musicien/groupe, agrémenté parfois d’un petit commentaire…

    1. Bob Dylan : Key West (Philosopher Pirate) extrait de Rough and Rowdy Ways, 2020, USA
    Voir Le tube de l’été.
    2. Darko Rundek : Zagrebačka Maglaextrait de U Sirokom Svijetu, 2000, Croatie
    Chanteur et guitariste du groupe de rock Haustor, culte en ex-Yougoslavie, Darko Rundek a aussi mené une longue et brillante carrière solo à partir des années 90. Inconnu en France, il est une sorte d’icône underground en Croatie.
    3. Ani DiFranco : Garden of Simpleextrait de Revelling/Reckoning, 2001, USA
    Pour ces quelques vers, redécouverts aux premiers jours du confinement : Science chases money and money chases its tail / and the best minds of my generation can’t make bail / but the bacteria are coming to take us down, that’s my prediction / it’s the answer to this culture of the quick fix prescription.
    4. Scarlett Johansson (feat. David Bowie) : Fannin Street (Tom Waits) – extrait de Anywhere I Lay My Head, 2008, USA
    En 2008, l’actrice Scarlett Johansson a sorti un disque dans lequel 10 des 11 morceaux sont des reprises de Tom Waits. Ce n’est pas l’album du siècle mais, au final, elle se sort plutôt pas mal de cet exercice pourtant casse-gueule…
    5. Geto Boys (Scarface) : G-Code – extrait de The Foundation, 2005, USA
    Ce morceau est un peu devenu l’hymne de mes errances interdites dans la ville confinée ou sous couvre-feu…
    6. General Woo : Ja Sam Ulica extrait de Pad Sistema, 2014, Croatie
    Une autre découverte croate. Ja Sam Ulica signifie Je Suis la Rue…
    7. DJ Krush : Inkling extrait de Trickster, 2020, Japon
    8. Bishop Nehru & DJ Premier : Too Lost extrait de Nehruvia: My Disregarded Thoughts, 2020, USA
    9. Magokoro Brothers : My Back Pages (Bob Dylan) – extrait de Masked And Anonymous: Music From The Motion Picture, 2003, Japon
    Cette géniale version japonaise du My Back Pages de Bob Dylan est à l’image du film dont elle constitue le générique d’ouverture, Masked & Anonymous, un truc complètement barré et décalé que quelques personnes – comme moi – adorent mais que beaucoup de gens détestent !
    10. Hubert-Félix Thiéfaine : Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable extrait de En concert à Bercy, 1999, France
    La version studio de cette chanson figure sur l’album Le Bonheur de la Tentation sorti en 1998, mais je préfère cette version live…
    11. Les Goules : Dimanche – extrait de Les Animaux, 2007, Canada
    12. Scott H. Biram : Everything Just Slips Away – extrait de Fever Dreams, 2020, USA
    Scott H. Biram est un bluesman texan que je suis depuis une quinzaine d’années. Son dernier album en date, Fever Dreams, sorti pendant la pandémie, est une vraie réussite.
    13. Neil Young : The Painter – extrait de Prairie Wind, 2005, USA
    Je n’écoutais plus Neil Young depuis un bon moment quand, en Mars 2020, pris de nostalgie allez savoir pourquoi, je me suis replongé dans certains albums du Loner
    14. Pips, Chips & Videoclips : Bog – extrait de Bog, 1999, Croatie
    15. Bruce Springsteen : Thunder Road – extrait de Born To Run, 1975, USA
    16. Wang Wen : A Beach Bum – extrait de 100,000 Whys, 2020, Chine
    A Beach Bum, un clochard des plages, c’est ce à quoi j’ai du ressembler plusieurs fois ces dernières années lors de mes errances sur la côte atlantique… cependant que mes écouteurs crachaient du Wang Wen.
    17. Billy Bragg : Never Cross a Picket Line – extrait de Rock The Dock, 1998, Angleterre  
    18. Unknown : 願榮光歸香港 – extrait de la révolte, 2019, Hong Kong
    Le mouvement de révolte de 2019-2020 à Hong Kong a été très loin et a suscité beaucoup d’espérance. Hélas, la pandémie en a brisé l’élan et le pouvoir a profité de l’accalmie pour mettre en place une nouvelle loi qui a permis de faire emprisonner la plupart des leaders du mouvement. Aujourd’hui, à Hong Kong comme dans bien d’autres pays, il est très difficile de reprendre les luttes là où elles en étaient avant l’instauration des « mesures sanitaires »…
    Bonus track 1. Hualun : The Song of Maldoror – extrait de Asian River, 2010, Chine
    Hualun vient de Wuhan, aujourd’hui ça vous place un groupe, mais lorsque je les ai découvert – grâce au film An Elephant Sitting Still dont ils ont composé la bande originale – pas grand monde ne connaissait cette ville…
    Bonus track 2. Tiana Major9 & EARTHGANG : Collide – extrait de Queen & Slim: The Soundtrack, 2019, USA
    Et pour finir de façon cool et tranquille, un titre extrait de la B.O. du méconnu mais excellent Queen & Slim, dernier film qu’on ait vu au ciné avant qu’il ferme…

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    ***

    Je conclus avec quelques livres lus durant cette période et que je voulais partager…

    Carlo Levi : Le Christ s’est arrêté à Eboli
    Au début du confinement, nous avons fait un tri dans notre bibliothèque pour aller mettre dans une boite à livres les ouvrages qu’on ne lirait pas, ou plus. J’allais y mettre Le Christ s’est arrêté à Eboli de Carlo Levi car je le traînais depuis des années sans le lire. J’y ai quand même jeté un dernier coup d’œil et j’ai alors constaté que le tout premier mot du livre, le tout premier mot de la préface, était « confinato », confiné. Étant donné la situation dans laquelle nous étions, comment ne pas le lire sur le champ après avoir vu ça ? Résultat, j’ai pris une énorme claque, ce livre est un chef d’œuvre.

    Max Stirner : L’Unique et sa propriété
    « Tout l’inepte bavardage de la plupart de nos journaux, n’est-ce pas incohérences de fous, qui souffrent de l’idée fixe, moralité, légalité, christianisme, etc., et qui paraissent s’agiter librement parce que l’asile d’aliénés où ils se démènent occupe un large espace ? »

    Karl Marx, Friedrich Engels : L’Idéologie allemande
    Critique d’une certaine pensée allemande de l’époque, mais beaucoup plus universel que ne le laisse entendre le titre… « L’État étant la forme par laquelle les individus d’une classe dominante font valoir leurs intérêts communs et dans laquelle se résume toute la société civile d’une époque, il s’ensuit que toutes les institutions communes passent par l’intermédiaire de l’État et reçoivent une forme politique. De là, l’illusion que la loi repose sur la volonté et, qui mieux est, sur une volonté libre, détachée de sa base concrète.

    Patrick Drevet : Quand la ville se tait – Chronique d’une sidération, mars-juin 2020
    Les carnets d’un anarchiste nantais qui arpente les rues de sa ville pendant le confinement, stupéfait par la docilité de ces concitoyens… J’aurais pu écrire quasiment chaque phrase de ce livre, j’ai vécu et ressenti exactement les mêmes choses durant ces deux mois surréalistes…

    Bekim Sejranović : Ton fils Huckleberry Finn
    « Souvent, pendant que les autres dormaient, je restais toute la nuit à écouter les discussions des oiseaux pêcheurs, à quelques kilomètres de distance en amont et en aval de notre petit bateau, et alors, je réfléchissais au fait qu’en réalité, tout ce que tu vois ou entends est déjà un passé irréversible. Alors même que tu prends conscience de ta propre vie, tu n’es déjà plus là. »

    . . .

  • Le tube de l’été

    ***

    Mon tube de l’été à moi, il est à chercher du côté du nouvel album de Bob Dylan, « Rough And Rowdy Ways », sorti en Juin 2020. Si la critique s’est extasiée sur le morceau fleuve (17 minutes, quand même) « Murder Most Foul », pour moi la pièce maîtresse de l’album est la dernière chanson du CD1 : « Key West (Philosopher Pirate) ».

    Déjà, quand mon songwriter préféré cite mon auteur préféré, ça me plait !

    « I was born on the wrong side of the railroad track / Like Ginsberg, Corso and Kerouac »

    Les liens entre les chansons de Bob Dylan et les romans de Jack Kerouac ont toujours été évidents. Dans son article « Bob Dylan’s Beat Visions (Sonic Poetry) » (extrait du recueil « Kerouac On Record ») Michael Goldberg met en lumière le génial pillage de Dylan pour son morceau « Desolation Row », dans lequel on retrouve un nombre invraisemblable de références au roman « Desolation Angels » de Kerouac. Que le chanteur cite enfin (à 79 ans !) le romancier à qui il doit tant, voilà qui fait plaisir !
    Évidemment cela ne suffit pas à faire un tube de l’été, d’ailleurs « Key West » n’a rien d’un tube de l’été, c’est une composition de 9 minutes pas dansante du tout ! À l’image de l’ambiance générale du dernier album de Bob, c’est calme, étrange, envoûtant et ça s’est révélé être la bande son parfaite pour mes errances estivales, 300/400 kilomètres de marche en temps de pseudo crise sanitaire.

    Key West est une île de Floride à plus de 180 kilomètres de la côte mais à laquelle on peut accéder via la Overseas Highway, une sorte d’autoroute sur la mer… Dylan encense ce bout du monde, ce « pays de la lumière », et certifie que si tu perds la raison, tu la retrouveras à Key West. Il y est aussi question de William McKinley, vingt-cinquième président des États-Unis, assassiné en 1901, et d’une radio pirate émettant depuis le Luxembourg et Budapest… Dylan raconte encore avoir été marié à une prostituée à douze ans puis il essaie de retrouver le signal de sa radio… Atmosphère vaporeuse, poésie opaque, accordéon discret, rythmique lente et lointaine, pas vraiment la recette pour faire danser dans les discothèques. Qu’à cela ne tienne, il n’y a plus de discothèques.

    Key West (Philosopher Pirate) by Bob Dylan

    McKinley hollered, McKinley squalled
    Doctor said, « McKinley, death is on the wall
    ‪Say it to me, if you got something to confess »
    ‪I heard all about it, he was going down slow ‬
    ‪I heard it on the wireless radio ‬
    ‪From down in the boondocks way down in Key West
    ‪I’m searching for love, for inspiration ‬
    ‪On that pirate radio station
    ‪Coming out of Luxembourg and Budapest ‬
    ‪Radio signal, clear as can be
    ‪I’m so deep in love that I can hardly see ‬
    ‪Down on the flatlands, way down in Key West


    Key West is the place to be ‬
    ‪If you’re looking for immortality ‬
    ‪Stay on the road, follow the highway sign ‬
    ‪Key West is fine and fair
    ‪If you lost your mind, you will find it there
    ‪Key West is on the horizon line

    ‪I was born on the wrong side of the railroad track
    ‪Like Ginsberg, Corso and Kerouac
    ‪Like Louis and Jimmy and Buddy and all the rest ‬
    ‪Well, it might not be the thing to do ‬
    ‪But I’m sticking with you through and through ‬
    ‪Down in the flatlands, way down in Key West
    ‪I got both my feet planted square on the ground ‬
    ‪Got my right hand high with the thumb down ‬
    ‪Such is life, such is happiness
    ‪Hibiscus flowers, they grow everywhere here
    ‪If you wear one, put it behind your ear
    ‪Down in the bottom, way down in Key West ‬


    Key West is the place to go
    ‪Down by the Gulf of Mexico ‬
    ‪Beyond the sea, beyond the shifting sand
    ‪Key West is the gateway key ‬
    ‪To innocence and purity ‬
    ‪Key West, Key West is the enchanted land

    ‪I’ve never lived in the land of Oz ‬
    ‪Or wasted my time with an unworthy cause ‬
    ‪It’s hot down here, and you can’t be overdressed
    ‪Tiny blossoms of a toxic plant ‬
    ‪They can make you dizzy, I’d like to help you but I can’t
    ‪Down in the flatlands, way down in Key West ‬
    ‪Well, the Fishtail Palms, and the orchid trees
    ‪They can give you that bleeding heart disease
    ‪People tell me I ought to try a little tenderness ‬
    ‪On Amelia Street, Bayview Park ‬
    ‪Walking in the shadows after dark ‬
    ‪Down under, way down in Key West ‬
    ‪I played Gumbo Limbo spirituals
    ‪I know all the Hindu rituals ‬
    ‪People tell me that I’m truly blessed ‬
    Bougainvillea blooming in the summer, in the spring
    Winter here is an unknown thing
    Down in the flat lands, way down in Key West

    Key West is under the sun, under the radar, under the gun
    You stay to the left, and then you lean to the right
    Feel the sunlight on your skin, and the healing virtues of the wind
    Key West, Key West is the land of light

    Wherever I travel, wherever I roam
    I’m not that far from the convent home
    I do what I think is right, what I think is best
    Mystery Street off of Mallory Square
    Truman had his White House there
    East bound, West bound, way down in Key West
    Twelve years old, they put me in a suit
    Forced me to marry a prostitute
    There were gold fringes on her wedding dress
    That’s my story, but not where it ends
    She’s still cute, and we’re still friends
    Down on the bottom, way down in Key West
    I play both sides against the middle
    Trying to pick up that pirate radio signal
    I heard the news, I heard your last request
    Fly around, my pretty little Miss
    I don’t love nobody, give me a kiss
    Down on the bottom, way down in Key West

    Key West is the place to be
    If you’re looking for immortality
    Key West is paradise divine
    Key West is fine and fair
    If you lost your mind, you’ll find it there
    Key West is on the horizon line

    . . .