Aujourd’hui sort la compilation Echoes for Palestine, Volume 2 produite par Cities and Memory et Deep Dive Sound, pour laquelle Zuunzug a réalisé le morceau Mount of Olives.
En vente sur Bandcamp (tout comme Echoes for Palestine, Volume 1 sortie en octobre), tous les bénéfices récoltés seront reversés à l’organisation caritative Hope & Play, qui vient en aide aux enfants de Gaza.
Le morceau réalisé par Zuunzug contient un field recording (enregistrement de terrain) réalisé sur le Mont des Oliviers, à Jérusalem, par Anders Vinjar. Nous sommes très heureux d’avoir pris part à ce projet.
La suite du voyage nous éloigne un peu de la sevdah puisqu’on quitte la Bosnie-Herzégovine. On reste cependant à ses frontières, au Monténégro. Ce ne sera donc pas une chanson de sevdah qui illustrera cet article, mais un morceau ambient que j’ai réalisé en rentrant de ce voyage et qui contient un enregistrement de la mer Adriatique réalisé à Sutomore, sur la côte monténégrine, et plus précisément sur la plage Devachen, un lieu semi-secret et magique auquel on accède en traversant un tunnel de 400 mètres… Devachen :
Après environ deux semaines en Bosnie-Herzégovine, je suis arrivé au Monténégro via un tout petit poste-frontière dans les montagnes, à une trentaine de kilomètres au sud de Foča, où je venais de passer deux jours. En arrivant par ici, d’emblée, le paysage est magnifique. Je songe à m’arrêter à Plužine, mais je pousse finalement jusqu’à Nikšić. Si vous êtes déjà allé en Ex-Yougoslavie, il y a de grandes chances que vous connaissiez ce nom grâce à (ou à cause de) la bière qu’on y brasse, la Nikšićko, une des plus célèbres des Balkans !
Je suis resté trois jours à Nikšić mais, à cause d’un sévère lumbago, je n’ai pas pu y faire tout ce que je voulais. J’y ai quand même vu l’impressionnant Monument des Partisans Communistes et la superbe Forteresse de Bedem, d’où viennent plusieurs des photos qui suivent…
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Podgorica :
Après des semaines à voyager en bus, j’étais heureux de découvrir une gare ferroviaire à Nikšić, et c’est de là que je suis parti pour rejoindre la capitale du pays, Podgorica. Au Monténégro, de nombreuses villes ont des noms en lien avec la montagne. Le nom même du pays, évidemment, Crna Gora en version originale, veut dire Montagne Noire. Podgorica signifie plus quelque chose comme Sous la petite montagne, mais la ville avait été renommée Titograd durant toute la période yougoslave !
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J’ai adoré Podgorica. J’avais entendu beaucoup de choses sur cette ville, que les voyageurs et touristes semblent ne pas trop aimer. La raison en est assez simple : Podgorica n’est pas une capitale destinée aux touristes, c’est juste une ville normale avec des habitants dedans. Il n’y a pas pléthore de musées, de clubs, de spots pour expatriés et voyageurs, tout le monde ne parle pas anglais… Si on ajoute à cela que la nature tout autour est magnifique (la mer n’est pas loin, les montagnes assiègent la cité…), on a une ville où les touristes ne passent qu’une nuit en descendant de leur avion, avant de se casser. Ainsi, ils ne découvrent pas vraiment Podgorica, son ambiance, ses différents quartiers, ses bars, ses restaurants, ses parcs… On avait vécu la même chose avec Oulan-Bator, en Mongolie, ville méprisée par les touristes dans laquelle nous avions fait de superbes rencontres et vécu des choses incroyables. Encore une preuve qu’il faut toujours aller voir par soi-même plutôt que d’écouter les on-dit…
Au bord de la rivière Morača qui traverse la ville.Stara Varos, la vieille ville de Podgorica.La Cathédrale de la Résurrection-du-Christ, dans laquelle on peut voir Tito, Marx et Engels brûler en enfer… Voir article.Mon premier contact avec Podgorica, juste en face de la gare !
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Sutomore :
Étant déjà allé plusieurs fois sur la côte monténégrine, j’ai cherché une destination que je ne connaissais pas, et c’est tombé sur Sutomore. Sutomore est une superbe petite ville calée entre les montagnes et la mer, c’est très vivant et très peuplé en été, mais ça n’en reste pas moins magnifique ! Mon lumbago de Nikšić m’a empêché ici aussi de trop grimper aux montagnes, je me suis donc rabattu sur le bord de mer, c’était pas mal non plus !
La plage Devachen.Les red rocks !
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Après trois jours de chaleur intense, j’ai quitté Sutomore sous l’orage et suis retourné traîner un peu à Podgorica… J’ai quitté le Monténégro le 6 août dans le train Tara qui va jusqu’au nord de la Serbie. Je me suis arrêté à Belgrade, où j’ai encore passé trois jours complétement déments avant de prendre pour de bon le chemin du retour.
(Encore deux articles à suivre avant la fin de la série…)
Voici la Zone 84, mon usine à la plage Canettes de bière, bouteilles, seringues et coquillages Machine sans âge, chiens errants devant l’usine Poursuivent les mouettes dans les vestiges et les ruines
D’une ère passée, où l’industrie ramenait l’argent En témoignent la rivière polluée, le mercure, le plomb dedans Crasse des ans, héritage toxique Sous les ondulations dangereuses des fils électriques C’est pas l’Amérique, l’Eldorado À part les mouettes crasseuses, il ne reste plus un oiseau Et plus un gosse ne joue là où on jouait gamins Barrières et barbelés interdisent l’accès au terrain
Là où rien ne va bien, là où chacun fait Ce qu’il peut pour survivre sans jamais être aidé Des bibles et des articles de charlatans sur les étals Et moi qui vends des cartes postales De la Zone 84…
Les blockhaus sur la plage noire, les bâtiments inachevés Vestiges d’une station balnéaire qui n’a jamais existé Les terrasses de cafés vides en cette nuit de décembre Les flocons qui tombent comme des cendres Lassé sur la promenade du front de mer sinistre Sous les réverbères à la lumière blafarde Monotone et fade, toujours le même registre Comment y concilier mes émotions bâtardes
Une usine désolée au bord d’une rivière Qui charrie des pneus qui s’enterrent dans la boue et prennent racine Je connais cette atmosphère comme si c’était chez moi Même les dessin animés de mon enfance ressemblaient à ça
Des arêtes rongées par les chats dans les poubelles Je crois que c’est quand la ville était la plus sale qu’elle était la plus belle De vieilles balles de tennis déchiquetées par les chiens Et près de la benne à ordures tous les gamins du coin On grimpait sur les murs rouge brique, on y restait Comme cette photo d’ouvriers sur les gratte-ciels new-yorkais
Gamins aux genoux écorchés, aux fringues de nos grands frères On était déjà démodés rien qu’en arrivant sur Terre On s’est servi là où on pouvait dans nos coins perdus Avec la sensation à dix piges à peine d’être les rois de la rue Sur les graviers, le goudron, l’herbe, le tapis De feuilles humides de la forêt du début de nos vies Dans la Zone 84…
Zonant dans la Zone 84 au volant d’un vélo Mad Max Naviguant entre les tours de béton gris, relax De l’eau de machine coule sur le béton fissuré J’observe et m’interroge sur mon quartier déstructuré Quatre types aux mains pleines de cambouis passent Ça sent l’essence, plein de capots ouverts sur la place Le goudron semble fondre sous la chaleur D’un été brûlant et étouffant quelque soit l’heure
Les lézards exsangues écrasent sur le bitume Dans le bistrot du coin ça picole et ça fume Dans les champs, des carcasses de deux-chevaux crevées Les mobylettes hurlent, les pots d’échappement percés
Les grands hangars des chantiers rouillent sur la plage Dès qu’on sort de la gare, on fait face au grand large Quelques bandes de goudron à moitié ensablées Et de l’usine coule des liquides contaminés Cabanes en tôle où les vagues frappent à la porte Clochards sans complice, chiens errants sans escorte La vieille gitane tire les cartes dans sa caravane Et la tempête gronde sous les crânes
Cafés en gobelets servis sur le trottoir Grands-mères édentées qui mendient dans leur désespoir On prie ou se signe aux pieds des églises Mais rien, non rien, ne conjure la crise
La décharge publique déborde sur la rivière Les écrans cassés voguent de là jusqu’à la mer L’encre, la peinture se déversent et colorent L’eau et la terre qui supportent nos sorts Dans la Zone 84…