• Zadar (Luka Modrić, l’orgue et le sphinx)

    16 – 19 juillet 2021

    Après trois jours et trois nuits à Rijeka, nous sommes partis pour Zadar, une ville dont le nom nous faisait penser à celui d’une planète dans un livre ou un film de science-fiction, un peu comme Oulan-Bator…

    Déroulé de la bande-son : 0,00-0,40 : Ambiance cosy bar quartier historique. 0,24-2,08 : Orgue marin de Zadar. 1,52-4,14 : Groupe traditionnel inconnu jouant pour un mariage. 3,32-5,37 : Les cigales et la mer.

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    « Zadar a le plus beau coucher de soleil au monde, plus beau que celui à Key West, applaudi chaque soir. » Alfred Hitchcock

    Si Hitchock n’est pas la moindre des « stars » qui ait fréquenté Zadar, les fans de foot se souviendront surtout que c’est le lieu de naissance de Luka Modrić, finaliste de la Coupe du Monde 2018 et sacré Ballon d’Or la même année. Modrić a joué dans le club local, le NK Zadar, jusqu’à ses seize ans. À l’époque, le club évoluait en première division croate mais il a depuis été rétrogradé au niveau régional (troisième division), suite à des déboires sportifs et financiers.

    Logé chez la fantastique Eda, petite dame affable et énergique, cultivant ses légumes et fabriquant son alcool qu’elle tenait à tout prix à nous faire goûter (ce à quoi elle est parvenue sans trop de problème), nous avons presque eu l’impression de séjourner chez une tante éloignée !

    Zadar est une ville assez grande et étalée mais, en gros, elle se divise en deux parties : le secteur ultra-touristique du centre-ville historique, et le reste. La passerelle Gradski – Gradski most – sépare le Zadar des habitants de celui des touristes, deux mondes qui se font face. Je caricature un peu évidemment mais c’est vraiment l’impression que cela donne en plein mois de juillet. D’un côté, la vieille ville, les musées, les restaurants, les night-clubs ; de l’autre, les barres d’immeubles gris, les terrains de sport, les snacks, les épiceries. Nous, en général dans ce genre de cas, on préfère les épiceries et les snacks mais bon, soyons franc, la virée dans le centre est indispensable, ne serait-ce que pour l’orgue marin.

    L’orgue :

    Le morske orgulje, ou sea organ, ou orgue marin, est un instrument de musique hors norme conçu par l’architecte Nikola Bašić en 2005. Dissimulé sous les escaliers de marbre qui descendent vers la mer au nord de la vieille ville, il consiste en trente-cinq tubes souterrains de diamètres et d’inclinaisons différents émettant une note quand l’air en est chassé par la mer qui s’y infiltre via une ouverture sous l’eau. L’instrument est donc parfaitement « invisible », si ce n’est les trous dans les escaliers qui laissent échapper les sons. Ce qui est fascinant, c’est que l’orgue ne s’arrête jamais de jouer mais que la musique change presque constamment en fonction du rythme et de l’intensité des vagues. L’agitation de la mer, le plongeon d’un vacancier ou le passage d’un bateau, tous ces éléments jouent sur les sonorités de l’infinie symphonie et cela fait maintenant plus de quinze ans que les vagues jouent de l’orgue sans jamais ni s’arrêter ni se répéter exactement.

    En plus de celui intégré dans la bande-son en début d’article (à partir de 0,24), nous avons réalisé un autre enregistrement de l’orgue en écoute (et téléchargement) ici, et pour plus de détails sur le fonctionnement et l’histoire du morske orgulje, voir la musique de la mer.

    Mais si tous ceux qui sont passés par Zadar ont entendu l’orgue marin, combien peuvent se vanter d’avoir vu le sphinx ?

    Le sphinx :

    Situé dans le jardin d’une villa dans un sale état sur le bord de la route qui longe la mer, le sphinx de béton de Zadar est une curiosité construite en 1918 sous la direction de l’artiste et historien Giovanni Smirich, qui vivait autrefois dans la villa, pour honorer la mémoire de sa femme défunte. En 1945, longtemps après la mort des propriétaires, la villa et son jardin ont été nationalisés et ouverts au public, le sphinx est alors devenu une célébrité locale !

    Au-delà de l’originalité de voir une statue symbolique de la mythologie égyptienne en Croatie, le sphinx de Zadar ne respecte pas tout à fait les standards du genre puisqu’il a non seulement des mains à la place des pattes mais aussi une longue tresse derrière la tête. Si l’on ajoute à cela des hiéroglyphes indéchiffrables sur la coiffe et un regard vide tourné vers la route, il n’est pas étonnant que toutes les rumeurs et légendes les plus folles aient circulé sur la sculpture et sur son créateur…

    Resté longtemps à l’abandon, tagué, dégradé, probablement volé (plusieurs éléments ont disparu), le sphinx a aussi échappé aux bombardements qui ont frappé la ville en 1943-1944 et 1991 et tient toujours fièrement sur ses quatre… mains, comme un symbole de « l’autre Zadar », celui qui reste inconnu de ceux qui se contentent de visiter le centre-ville.

    Bonus : allez jeter un œil au sphinx de Zadar photographié par Google Maps, il est tellement « humain » que son visage a été flouté comme s’il s’agissait d’un passant sur le bord de la route !

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    Ayant vu celui à Mimizan (mais pas celui à Key West), je ne suis pas sûr que Zadar ait le plus beau coucher de soleil au monde, mais je comprends la fascination d’Hitchcock pour le ciel au-dessus de cette ville, que nous avons vu passer du bleu clair au noir en quelques dizaines de minutes alors que nous marchions, sans le savoir, vers le sphinx. Après avoir immortalisé la tornade qui s’était formée au-dessus de la ville, nous avons du rapidement nous réfugier dans un bar quand la pluie et le vent ont commencé à se déchaîner de notre côté.

    Au final, si Zadar était une planète sortie d’une œuvre de SF, ce serait un monde tout en contraste, avec un hémisphère constamment face au soleil et un autre éternellement caché. Du centre du globe s’élèverait une musique à la fois funeste et joyeuse et, quand il ne refléterait pas le calme absolu et parfait, le ciel cracherait des éclairs d’acier. Partout sur Zadar, des androïdes érigeraient des temples antiques en l’honneur de leurs égéries et tout le cosmos viendrait voir ses constructions bizarroïdes sans jamais en percer le secret.

    Luka Modrić serait le roi de cette planète, coiffé d’un Ballon d’Or…

    Merci au groupe inconnu présent sur la bande-son. Next stop : Split.

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  • Antiblockhaus

    En juin 2021, j’ai fait une marche sur la Côte d’Opale, de La Panne à Dunkerque, soit un peu plus de vingt kilomètres à longer la mer sur la plage. À plusieurs reprises, de violentes averses m’ont obligé à aller me réfugier dans les seules choses proches capables de m’abriter : des blockhaus. Entre Bray-Dunes et Leffrinckoucke, ce n’est pas ce qui manque et j’en étais très heureux car il n’a pas arrêté de pleuvoir… Parfois bloqué pendant assez longtemps dans ces abris un peu sinistres, j’ai fini par faire des enregistrements avec mon Zoom H4N histoire de passer le temps. La base du morceau Antiblockhaus – le crépitement que l’on entend tout au long de la piste – vient de là, il s’agit du bruit de la pluie sur le sable capté de l’intérieur de mon bunker…

    Antiblockhaus n’est pas un plaidoyer contre ces très romantiques ouvrages militaires qui m’ont servi d’abris, le préfixe anti signifie ici inverse, opposé, car cette composition se veut le contraire du blockhaus, cette carapace de béton armé, sombre et isolée, à l’épreuve des balles mais aussi de tout le reste, de la pluie, du vent, du soleil… Antiblockhaus propose d’aller sous l’averse et de laisser le bunker se faire lentement ensevelir par les sables, il est temps de vérifier si les explosions que l’on entend au loin sont des feux d’artifice ou des bombardements. Il faudra bien sortir un jour de toute façon, quel que soit le risque, non ?

    Audio : Manu / Visuel : Malka

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  • Zuunzug Field Recording (2)

    Dans notre rubrique « Le saviez-vous ? » : le tout premier field recording (ou enregistrement de terrain) a été réalisé en 1889 par un enfant de huit ans, Ludwig Koch, qui s’est amusé à enregistrer les oiseaux avec le matériel (très) rudimentaire de son père, avant de devenir, une fois adulte, un éminent « field recordist ».

    Cent trente ans plus tard, cette pratique reste méconnue bien qu’elle soit utilisée dans des milliers de documentaires et dans nombre de podcasts.

    Trois mois après son lancement, la page Zuunzug Field Recordings compte une douzaine d’enregistrements, l’équivalent d’un album, c’est donc l’occasion d’en faire un petit recensement.

    Dans le prochain article, ce sont les trente morceaux réalisés par Zuunzug depuis 2018 qui feront l’objet d’un regroupement, histoire de faire les comptes avant la sortie du premier disque (4 titres) qui arrivera début Juillet, l’album étant pour sa part prévu pour l’automne !

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    Au bord de la rivière Reie, à Bruges. 

     
    En direct du sixième étage…
     
     
    Bord de mer, Charente-Maritime. 
     
     
    Station de lagunage d’Angoulins.
     
     
    A l’aube, après une nuit blanche, dans le Vieux Mans. 
     
     
    Nationale 20, Foix (Ariège).
     
     
    Parentis-en-Born (Landes). 
     
     
    Sur l’estacade de Capbreton. 
     
     
    Mix du sixième étage. 
     
     
    La mer à Moliets-et-Maa, Landes, Juillet 2020. 
     
     
    Quelque part dans les Alpes mancelles… 
     
     
    Montluçon, un 31 décembre 2019. 
     
     
    Novembre, trottoirs pluvieux. 
     

    Enregistrements & photos : Manu. Tous nos field recordings sont téléchargeables gratuitement et 100% libre de droit, Waves over seashells a d’ailleurs déjà été réutilisé par Marco Lucchi pour une de ses compositions : Undertow.

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